Aujourd’hui, c’était l’anniversaire de ma sœur Holly, mon ainée de quatre ans. Si j’avais toujours été plus proche de Noélia, la plus vieille de nous trois, je vivais aujourd’hui avec Holly comme seule sœur à la maison et de ce fait, nous passions désormais pas mal de temps ensemble. Il était certain qu’avec Nono, nous avions un rapport réellement fusionnel, je pouvais tout lui dire, je lui vouais une confiance absolue, et je savais que quel que soit ce que je lui demandais, elle répondrait présente. Ça avait toujours été comme ça depuis toute petite, elle m’avait protégé dès ma naissance, prenant le rôle d’une deuxième mère pour moi. Avec Holly, ça avait été différent. Nous étions aussi proches que deux sœurs puissent l’être mais elle était plus à l’écart, préférant passer la soirée le nez dans ses bouquins qu’avec nous avachies dans le canapé devant une comédie romantique. Souvent, on venait frapper à la porte de sa chambre, espérant secrètement qu’elle nous rejoindrait et viendrait s’emmitoufler sous le plaid avec nous, se goinfrant de popcorn les larmes aux yeux devant ce film à l’eau de rose qu’on aimait tant. A chaque fois, elle déclinait l’invitation et je redescendais en bas, ma déception sous le bras. « Encore raté… » Disais-je à Noélia en prenant une poignée de mais soufflés et en m’installant à ses côtés. Seulement depuis notre arrivée à Winnipeg, Noélia avait pris son indépendance, elle passait son temps au cabinet dans ses dossiers, on se voyait beaucoup moins. A la maison, Holly était toujours très studieuse, révisant et buchant sur ses cours des heures durant. Du coup, je vaquais à mes occupations, qui n’étaient pas franchement nombreuses. Je n’avais pas énormément d’amis ici, et depuis la fuite d’Eli, j’étais un vrai déchet. Je voyais bien que ma sœur ne voyait pas ma dépression d’un bon œil mais je n’avais aucune envie de parler de ce qui m’arrivait, encore moins à Holly qui avait toujours été un peu trop proche des parents. J’avais peur de ce qui pourrait arriver si je lui avouais ce qui se passait dans ma vie.
Si pour certains aujourd’hui était le jour de Noël, l’occasion de se retrouver en famille et de manger les restes du réveillon, pour nous, les Barnes, le 25 décembre rimait également avec la naissance d’Holly. On avait nos petites habitudes, le matin, maman allait chercher le gâteau préféré de la princesse du jour à la boulangerie, on mangeait à s’en faire péter le ventre, puis on lui apportait son cadeau une fois que tout le monde avait fini sa part de gâteau. Depuis toujours, on avait fait en sorte de bien différencier Noël de l’anniversaire de ma sœur…. Le matin, nous ouvrions les cadeaux au pied du sapin, puis le midi, c’était Holly la star du repas. Alors aujourd’hui, pour ses vingt-et-un ans, j’avais prévu de m’occuper de tout. Ma grande sœur allait enfin être majeure, il fallait mettre les petits plats dans les grands. Malheureusement, papa avait été appelé en urgence à l’hôpital, et maman était malade comme un chien, au lit avec quarante de fièvre. Il ne restait donc que moi pour rendre cette journée inoubliable. Récemment, je n’avais pas vraiment été une sœur exemplaire, je passais mon temps enfermée dans ma chambre et ruminer et à constater que mon monde s’écroulait sans lever le petit doigt. Holly avait essayé de discuter avec moi, de me remonter le moral mais qu’est-ce qu’elle en savait elle ? Elle ne m’avait jamais aidé au moment où les parents avaient interdit à Eli de remettre un pied à la maison il y a de ça des années, et même cet été, elle n’avait pas pris le temps de discuter avec lui plus que ça, à croire que son rôle de fille modèle lui tenait trop à cœur pour risquer d’être vue à ses côtés. Autrement dit, je lui en voulais un peu, au fond, de ne pas s’intéresser à moi suffisamment pour faire la part des choses. Pour elle, il n’y avait toujours eu qu’un seul chemin, celui que nos parents lui destinaient, et parfois, c’était vraiment lassant. Cependant, j’allais mettre toutes mes émotions de côtés et préparer à Holly un super anniversaire ! Ça me changerait les idées qui plus est.
J’enfilai un jean dont je laissai la fermeture éclair et le bouton ouvert… Evidemment, ça ne rentrait plus. Par-dessus, une tunique large qui recouvrait le tout, et direction l’épicerie et les petits commerces locaux. Je n’avais pas vraiment réfléchi à ce que j’allais lui préparer à manger mais tout me donnait envie, surtout des choses pas franchement habituelles que je jetai dans le caddie avec frénésie. Des cornichons trempés dans du Nutella, voilà ce dont j’avais envie… tout de suite… maintenant. Et dire que j’allais devoir attendre de rentrer à la maison. Finalement, j’avais opté pour la pizza préférée de ma sœur, après tout, je ne savais pas cuisiner et je risquais plus de l’empoisonner qu’autre chose si je me tentais à un petit plat digne de MasterChef. Quelques petits légumes à croquer, du tsatsiki, de la sauce piquante pour faire une petite entrée, une bouteille de soda, emballés, c’était pesé. Je pris ensuite la direction de la boulangerie, dont nous connaissions très bien les propriétaires. A vrai dire, tout le monde connaissait papa, le chirurgien reconnu, celui qu’on retrouvait sur les bancs de la messe le dimanche, comment le manquer ? « Bonjour Harper, j’ai tout préparé pour vous ! » s’écria Madame Fierce avant de me présenter le gâteau. J’en restai bouche-bée. On aurait dit un gâteau de mariage, il était splendide. « Tu souhaiteras un joyeux anniversaire à Holly de notre part ! » ajouta-t-elle avec un sourire malicieux. Elle m’aida à transporter le dessert jusqu’au coffre de la voiture, et après l’avoir remerciée chaleureusement, j’empruntai le chemin du retour. Il fallait que je fasse une entrée discrète si je ne voulais pas gâcher la surprise. Le gâteau pesait une tonne, je pris la décision de le laisser dans le coffre, après tout, vu la température extérieure, on avait un frigo grandeur nature dès qu’on ouvrait la porte d’entrée. Je remontai me faire un brin de toilette, puis me mis immédiatement au travail, coupant les carottes, concombre en stick (tout en me goinfrant de cornichons en même temps…), dressant tout sur un plateau pendant que la reine du jour trainait encore dans sa chambre, feuilletant surement les nouveaux livres que le Père-Noël lui avait apportés. J’avais commandé quelques semaines plus tôt une guirlande lumineuse « Happy Birthday Holly ! » sur Internet, elle trônait désormais juste sous l’arche qui séparait le hall d’entrée de la salle à manger, bien visible depuis la descente des escaliers. J’avais mis la table pour nous deux, allumé quelques bougies et gonflé des ballons que j’avais positionnés dans les coins stratégiques qui la mènerait jusqu’à moi. A présent, tout était prêt, j’étais excitée comme une puce. Il ne manquait plus qu’elle… Ah non ! J’avais oublié l’essentiel. En deux temps trois mouvements, j’étais à quatre pattes dans le cellier de papa à chercher une bouteille de champagne. Mademoiselle avait l’âge, il fallait célébrer ça avec un Dom Perignon, après tout, les parents nous avait toujours dit que c’était ce qui se faisait de mieux. Maintenant, tout était fin prêt. « Holly !!!!! Tu peux descendre steuplait ???? » Hurlai-je du bas des marches.
Holly était assise dans sa chambre à réviser, une fois de plus, ses cours de Pneumo – phtisiologie (comprenez en rapport avec la tuberculose pour les non-initiés). On avait beau être le 25 décembre, elle n’en avait que faire en particulier. Certes, c’était le jour de Noël et qui plus est son anniversaire, celui de sa majorité pour être plus précis. Mais cette année, elle n’avait vraiment pas envie d’y penser et de s’en soucier pour le moment… Cela sous-entendait bien trop de complications à venir de façon imminente, elle le savait et c’est pour cette raison qu’elle avait tant redouté cet anniversaire encore plus que ceux des années passées… Mais bon, elle se devait de faire bonne figure, encore et encore, devant toute la famille et ses sœurs en particulier !
Heureusement pour elle, il n’y aurait pas de grande fête aujourd’hui, ni de grandes effusions ! En effet, ses parents et ses sœurs avaient pour habitude de lui préparer un repas digne d’une des plus grandes réceptions de la villa Barnes, le tout accompagné bien sûr de son gâteau favori et de quelques cadeaux qui s’ajoutaient à ceux reçus le matin même.
Mais cette année, on allait changer la donne ! Pour commencer, l’aînée des filles Barnes ne vivait plus ici depuis leur emménagement à Winnipeg l’an passé. L’année dernière justement, Noélia avait continué de suivre les traditions familiales mais cette année, elle était bien trop occupée avec son cabinet et s’était contenté d’un rapide coup de fil à sa sœur le matin même, s’excusant toutefois de ne pas pouvoir venir passer la journée avec elle. Holly l’avait alors rassurée en lui disant que ce n’était pas grave, qu’elle avait passé l’âge de toute manière. Elle passerait la voir bientôt d’ailleurs, elle voulait parler à son aînée en tête à tête, loin des oreilles indiscrètes !
Ensuite, M. Barnes avait été appelé en urgences, pour le plus grand bonheur d’Holly, qui avait toutefois tenté de le cacher le plus possible. Quant à sa mère, elle dormait, étant malade comme rarement depuis plusieurs jours à présent. Il ne restait donc plus que Harper, sa petite sœur. Holly ne pensait pas une seule seconde qu’elle voudrait faire une petite fête d’anniversaire juste toutes les deux ou quoi que ce soit d’autre d’ailleurs ! En effet, Holly avait bien remarqué que le moral d’Harper était au plus bas depuis plusieurs jours, plusieurs semaines, plusieurs mois mêmes ! Depuis le départ d’Eli en fait… Holly en voulait beaucoup au jeune homme ! Certes, elle ne le connaissait pas particulièrement, bien qu’il soit le meilleur ami de sa petite sœur et que tous deux se connaissent depuis des années, mais elle ne supportait pas de voir sa petite sœur dans cet état là à cause de lui ! A cause d’un homme ! Elle ne portait que très peu de personne dans son cœur mais lorsque quelqu’un osait s’en prendre aux gens qui lui étaient chers, Holly devenait alors la plus rancunière des filles Barnes ! Elle pouvait même se transformer en vraie petite peste s’il le fallait ! Et voir Harper se laisser aller comme ça ne l’avait guère réjouie… Elle n’était pas au courant de toute l’histoire et avait bien tenté d’en savoir un peu plus en questionnant sa sœur, mais Harper était restée muette comme une carpe, préférant s’enfermer sur elle-même plutôt que de se livrer à sa sœur… Holly vivait d’ailleurs très mal ce silence… Elle avait bien remarqué quelques changements chez Harper mais ne savait pas vraiment comment les interpréter… C’était d’ailleurs pour cette raison qu’elle avait dit, plus tôt dans la journée, à Noé qu’elle passerait la voir. Elle voulait en parler avec elle, trouver des solutions… Elle était sûre qu’Harper s’était confiée à leur sœur aînée ! Elle voulait juste l’aider un peu à aller mieux, au quotidien, lui faire oublier ce saltimbanque qu’était Eli au vue de la façon dont il semblait s’être comporté avec elle… Bref, elle allait tenter de faire quelque peu abstraction de tout ça et ne rien laisser paraître, comme à son habitude, devant Harper et elle trouverait le moyen de régler ça d’une façon ou d’une autre !
En tout cas, elle ne s’attendait donc clairement pas à ce qu’Harper est organisé quoique ce soit ! Aussi, c’est quelque peu étonnée mais détendue qu’elle sortit de sa chambre et descendit l’escalier de la villa familiale lorsque sa sœur l’appela. Elle s’apprêtait à lui demander ce qu’elle voulait mais elle n’en eu pas le temps. Son estomac se noua soudainement lorsqu’elle releva le regard de ses chaussettes et aperçu la guirlande qui trônait fièrement sous l’arche ! Un instant, elle cru rêver ! Non, elle avait du mal voir ! Elle s’arrêta, ferma les yeux quelques instants en pensant très fort dans sa tête : « Non Holly, tout va bien, tu as rêvé, il n’y a rien ! ». Elle se décida à les rouvrir après s’être répété trois fois cette même phrase. Mais non, elle n’avait pas rêvé ! Harper l’attendait fièrement sous l’arche, une bouteille à la main, avec un sourire qui avait été si rare sur le visage de sa sœur ces derniers temps ! Bien qu’abasourdie par la découverte, Holly ne put s’empêcher de sourire jusqu’aux oreilles en voyant ce sourire si radieux sur le visage de sa sœur ! Il lui avait tant manqué ce sourire ! Ses yeux s’humidifièrent légèrement, et, bien qu’elle ne fût vraiment pas décidée à fêter ces fameuses 21 années, elle se jeta dans les bras de sa sœur, admirative des efforts qu’elle avait produit malgré son humeur morose actuelle !
« Tu es trop bête ! Tu n’aurais pas dû ! »
On aurait presque entendu quelques trémolos dans sa voix ! Cela pouvait sembler bête, voire même pathétique, mais Holly était comme ça aussi, parfois… Surprenante et quelque fois à fleur de peau ! Quelque rare fois tout de même, pour ne pas dire presque jamais. Mais, cette journée, elle l’avait tant redoutée depuis des semaines qu’elle en avait oublié l’essentiel : l’amour qu’elle éprouvait pour sa famille, pour ses sœurs, pour Harper… Aussi, pour tenter de cacher quelque peu son émotion qui ne lui était clairement pas coutumière, elle se contenta de serrer un peu sa sœur dans ses bras, histoire de noyer le poisson comme on dit ! Il allait bien falloir trouver une parade pour ne pas qu’Harper remarque trop son état, dirons-nous anormal lorsque l’on connaît un peu mieux le personnage !
Invité
Sujet: Re: Holly&Harper ❧ Happy Birthday sis' ! Sam 11 Jan - 4:02
Holly&Harper ₰ Happy Birthday Sis'.
Après avoir hurlé du bas des escaliers, je finis par réussir à sortir ma sœur de ses bouquins et à la faire bouger ses fesses jusqu’à moi. Il était hors de question qu’elle passe le jour de son anniversaire enfermée dans sa chambre à réviser, elle était finalement majeure, on se devait de souligner l’événement et de célébrer son entrée dans l’âge adulte, ou plutôt son accès légal à la dépravation, aux fêtes alcoolisées, à l’achat compulsif de bouteilles de vodka au liquor store du coin, à la commande d’un verre de vin pour accompagner son plat au restaurant avec les parents, finie pour elle la petite croix sur la main si jamais elle voulait aller en boîte, non maintenant, elle entrait dans la cour des grands, elle pouvait même louer une voiture si le cœur lui en disait. Ah ce que j’aimerais avoir vingt-et-un moi aussi, tout ça serait derrière moi, toute cette souffrance, ce sentiment de vide intérieur aurait disparu, du moins je l’espère, ma vie aurait repris son cours, je pourrais être heureuse éventuellement, avec Eli, et notre bébé, ou sans Eli… Ou sans le bébé, ou sans les deux, je ne savais pas très bien ce que l’avenir avait en tête pour moi pour être honnête. Plus je pensais à mes options, plus elles se réduisaient, et plus j’avais peur. Je n’avais pas envie de me mettre à pleurer aujourd’hui, je voulais faire honneur à Holly, j’étais la seule encore présente et suffisamment en forme pour veiller à ce que cette journée lui laisse un bon souvenir, je n’avais pas le droit de la ruiner en m’apitoyant sur mon sort, ce n’était pas le moment, j’avais les quatre-cent soixante-quatre autres jours pour ça. En la voyant descendre les escaliers, j’estimais mon pourcentage de réussite à environ cent pourcents. La surprise avait visiblement fait son effet, un sourire arborait son visage en même temps que le mien, qu’est-ce que j’adorais ce genre de choses ! A mon grand étonnement, elle qui d’habitude masquait ses émotions à la perfection, Holly parut complètement submergée par l’émotion et ses yeux humides vinrent s’étouffer dans mon pull lorsqu’elle me prit dans ses bras. Ma sœur était vraiment bizarre, la majorité l’avait-elle rendu plus sensible, plus fleur bleue, plus comme moi en fait ? « Et ba dis donc, j’pensais pas te faire autant d’effet ! » M’exclamai-je fièrement. Je n’avais absolument l’habitude de voir ma sœur se mettre dans un tel état, elle était plutôt du genre à se renfermer sur elle-même et ne jamais trop exprimer ses sentiments, en tout cas, pas de cette façon-là… Holly ? Emue aux larmes ? Pour une vulgaire banderole et une bouteille de champagne ? Elle avait déjà vidé une bouteille en cachette dans sa chambre peut-être… Fronçant les sourcils, j’exprimai mes doutes : « T’es sûre que ça va ? T’es vraiment bizarre dis donc ! » C’était sûrement parce qu’elle était triste que les parents ne soient pas là, ni notre grande sœur Noélia… Elle devait se sentir abandonnée en ce jour si spécial, et même si j’avais fait de mon mieux, elle devait être déçue au fond. Tout le monde rêve de ce jour-là, de l’immense fête qui s’en suit, de l’alcool qui coule à flot, et moi, je lui propose du champagne pour elle toute seule et une pizza en tête à tête… Super festif effectivement ! La pauvre…
La prenant par la main pour tout de même essayé de faire les choses bien et afin de passer une bonne journée malgré tout, je lui présentai les petits plats que j’avais concoctés pour l’apéritif, et l’installai sur le fauteuil de papa, pour une fois qu’il était libre, autant en profiter. Sur le rebord du canapé dans lequel je m’étais enfoncée, peinant à me relever à cause de mon gros ventre à peine camouflée, je finis par attraper le paquet que j’avais placé ici avant que mon aîné ne descende de sa chambre. J’avais passé quelques heures à la confection de son cadeau et j’y avais mis du cœur à l’ouvrage, alors j’espérais qu’elle apprécierait le geste autant que j’avais apprécié de préparer tout ça pour elle. A l’intérieur, caché sous ce papier rose à fleurs et ces bolducs doré, se trouvait un cadre dans lequel j’avais rassemblé toutes les photos possibles et imaginables de nous trois depuis notre plus tendre ensemble, allant de ma naissance à nos vacances au Mexique, en passant par des repas de famille barbants et des querelles de gamines. En retrouvant toutes ces photos, je m’étais remémorée plein de petites anecdotes de notre jeunesse et tandis qu’elle se penchait pour regarder plus attentivement les clichés, je me pris à rire bêtement en repensant au jour de mes huit ans. Holly en avait douze, Noélia dix-neuf, mais pourtant, sans le savoir, nous étions toutes les trois descendues avec une robe rose et une queue de cheval relevée. J’avais pointé le bout de mon nez la première dans le salon, sous les yeux fiers de mes parents, puis Noélia était arrivée, et en voyant sa tenue et sa coiffure, nous avions eclaté de rire. Effectivement, bien qu’on ait énormément d’écart, nous avions toujours eu cette façon de penser identique qui nous poussait sans le vouloir à agir de la même manière. Toutefois, le plus drôle fut le moment où Holly se decida enfin à nous rejoindre, avec sa petite robe bouffante, rose elle aussi, et ses cheveux tirés en arrière retenus dans une queue de cheval. Le plus bel anniversaire de ma vie, parce que nos éclats de rire s’étaient entremêlés, nous étions insouciants et tellement heureux. Pointant la photo en question du doigt, je riais à nouveau : « Tu te rappelles de ça ? Ça reste un de mes meilleurs souvenirs ! »
Pendant qu’elle regardait les photos, évidemment, la quantité de sticks et de chips diminuait à vue d’œil. Comme toujours, j’avais très faim, et je dévorais pour deux. « Si j’étais toi, je commencerais à piocher dedans avant que l’ogre Harper ne dévore tout. » Dis-je en lui tendant les bols. J’aurais eu envie de lui parler de ma grossesse, ou d’Eli maintenant que nous n’étions que toutes les deux, dans un moment plus intimiste, mais je n’y arrivais pas. Il y avait toujours une bonne raison qui m’empêchait de parler à Holly, et je prenais ça comme un signe du destin, ce n’était, encore une fois, pas le moment, pas aujourd’hui, ni même demain parce qu’elle sera encore plongée dans ses cours de toute façon. « Tu m’as l’air perturbée, tu déprimes de passer à l’âge adulte ? Faut pas, t’as trop de la chance ! » C’était dingue, j’avais donné de ma personne et mis de côté mon amertume, mais c’était à croire qu’Holly l’avait ramassée et s’était empressée de la laisser la gagner. A croire qu’il devait toujours y avoir l’une des filles Barnes en mode blasée au 31 Snowflake Lane. Je commençais à me poser des questions, et si elle avait râté ses examens ? Quoique… Elle avait dit qu’ils avaient lieu après les vacances pourtant. Essayant d’instaurer un climat un peu plus festif, je lançai la musique dans le salon et entamai quelques pas de danse en faisant signe à ma sœur de me rejoindre au milieu du salon. Un tour, deux tours, trois tours sur moi-même, je chantais à tue-t^te dans le salon, virevoltant autour de ma soeur dans un regain certain d'énergie. Soyons fous, j’allais même déboucher le champagne pour la peine, je n’avais jamais eu l’occasion d’être à l’origine du « pop » suivant l’ouverture d’une bouteille, et ça se voyait. Oubliant de faire barrage avec ma main, le bouchon s’envola dans les airs avant de rebondir contre le lustre et finir sa course dans l’œil d’Holly. « Oh non, pardon !!!! Ca va ? Holly, réponds-moi, est-ce que ça va ? Tu m’entends ? » Elle était allongée sur le sol, visiblement choquée par le missile qu’elle venait de recevoir en pleine face.
Sujet: Re: Holly&Harper ❧ Happy Birthday sis' ! Dim 19 Jan - 14:23
Happy Birthday Sis !
Harper & Holly
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Alors qu’Holly avait rejoint sa sœur tout en tentant de lui cacher, vainement, son trop plein d’émotions soudain, Harper se moqua gentiment d’elle puis finit tout de même par lui demander si elle se sentait bien au vue de sa réaction. Holly desserra son étreinte et regarda sa petite sœur en lui souriant : « Oui oui, désolée ! C’est juste que… je ne m’attendais pas à tout ça aujourd’hui quoi ! ». Elle reprenait petit à petit contenance, se disant qu’il ne fallait pas qu’Harper se doute de quelque chose ! Après tout, c’était elle la grande sœur et Harper avait déjà bien assez à gérer avec sa rupture avec Eli ! Pas question pour elle d’en rajouter, il fallait qu’Harper garde sa bonne humeur retrouvée et Holly se devait de prendre sur elle, comme d’habitude. Elle reprit alors comme si de rien n’était : « C’est juste qu’avec papa à l’hôpital, maman malade et Noé qui ne vit plus là… J’pensais pas qu’on aurait fait un petit quelque chose quoi ! Mais tu es formidable d’avoir fait tout ça, merci ! » Elle lui lança un petit clin d’œil complice. Certes, les deux sœurs l’étaient rarement – complices – mais Holly s’était mis en tête dernièrement que, malgré ses propres problèmes, elle allait faire tout ce qu’elle pouvait pour pouvoir remonter le moral de sa petite sœur. C’était son rôle après tout puisque Noé ne vivait plus ici… Toutefois, elle était à des années lumières de s’imaginer la vraie raison de la détresse de sa sœur…
Harper ne laissa pas beaucoup de répit à sa sœur et l’emmena jusqu’au fauteuil paternel. En général, aucune des filles Barnes, ni même Mme Barnes elle-même, n’avait le droit d’y siéger mais aujourd’hui était l’exception qui confirme la règle comme on dit ! Après avoir attrapé un petit four au passage préparé soigneusement par Harper, Holly s’y installa confortablement. « Tu t’es surpassé sérieusement ! Je suis fière de toi ! » lui dit-elle avec un sourire avant de se retrouver, prise de court, devant un cadeau emballé avec soin. Elle regarda de nouveau sa sœur, un sourire fier affiché sur le visage et déballa doucement le cadeau. Même lorsqu’elle recevait un cadeau, Holly restait patiente et soigneuse, pas question de déchiqueter l’emballage, non, elle le défaisait bout par bout, souriant comme une enfant de 8 ans un beau jour de Noël. Elle finit par découvrir sous ce papier rose bonbon, un très joli cadre regroupant tout un tas de photos de leur plus tendre enfance aux années un peu plus récentes. Harper avait visé juste en lui offrant ce cadeau. Holly, qui était très "famille" contrairement à ce que l’on aurait pu penser, était complètement émerveillée face à toutes ces photos. Elle les regardait une par une, observant avec attention chaque petit détail, se remémorant chaque souvenir ! Un sourire sincère était apparu sur son visage à la minute où elle avait aperçu les premières photos. Qui aurait cru que – malgré ce jour tant redouté par la jeune femme – Holly retrouverait une si grande joie en ce jour si particulier ? Elle allait enfin remercier sa sœur – elle avait été vraiment trop absorbée par toutes les photos qu’elle n’avait même pas pris le temps de la remercier encore – quand Harper lui montra une photo en particulier : c’était celle de l’anniversaire de Harp’, pour ses 8 ans. Les trois filles Barnes, par un parfait hasard, étaient arrivées toutes les trois dans le salon familial vêtues et coiffées de façon très similaires ! « Oh oui ! Tes huit ans ! Qu’est-ce qu’on avait pu rigoler ! Papa et maman étaient persuadés qu’on s’était mises d’accord sur notre tenue pour êtres toutes raccord ! On a bien dû rire pendant près d’une heure juste pour ça ! Regarde ! On dirait des Daltonettes roses ! » Elle rit de bon cœur face à sa blague aussi nulle soit-elle mais elle était sincèrement heureuse de se remémorer tout ça avec sa petite sœur !
« Franchement, merci Harp’, tu pouvais pas me faire plus plaisir ! Je sais déjà où je vais pouvoir l’accrocher en plus ! » lui dit-elle en souriant et en lui faisant un bisou sur la joue en guise de remerciements.
Harper lui tendit alors des chips pendant que Holly continuait de regarder les photos encore et encore avec nostalgie. « Merci c’est gentil ! Mais oui t’es une vraie petite gloutonne aujourd’hui dis donc ! Tu manges pour deux ou quoi ? Mais ça fait plaisir à voir en même temps. » Certes, Holly ne pensait pas si bien dire. Même si elle avait bien remarqué la prise de poids de sa petite sœur, elle ne lui en avait pas touché un mot, préférant pour le moment se voiler la face et elle mettait ça sur le compte de sa dépression suite à sa rupture avec Eli…
Harper qui observait du coin de l’œil sa grande sœur, finit par lui demander si ça allait. Elle avait bien remarqué que Holly n’était visiblement pas d’humeur à faire la fête ces temps-ci – même si ce petit anniversaire surprise lui faisait le plus grand bien soit dit en passant. Elle se contenta de lui répondre simplement en souriant timidement : « Oui t’inquiète ! C’est juste… les exams, le stress tout ça… » S’en suivit une petite danse improvisée de Harper qui semblait complètement déchaînée ! Holly l’avait rejointe mais ce n’était pas trop son truc à elle de danser, chanter à tue-tête et tutti quanti. Elle fit tout de même un effort afin de récompenser ceux produits par Harper et puis, ça lui changeait tellement les idées en même temps ! Elle écoutait la musique qui résonnait dans ses oreilles, bougeant du mieux qu’elle le pouvait au vue du rythme et de ses compétences de danseuse d’un jour, puis plus rien ! Sans comprendre le pourquoi du comment, elle se retrouva allongée à terre, un peu sonné, avec une douleur à l’œil. Elle se redressa et regarda sa petite sœur, paniquée visiblement. « Non ça va… Enfin je crois ! Comment t’as fais ton compte ? » Elle n’était pas énervée, juste un peu amochée et presque amusée par la situation grotesque. Elle se releva tout en se tenant son œil quelque peu meurtri par le bouchon qu’elle n’avait clairement pas vu arriver ! Heureusement qu’elle vivait sous le toit de chirurgiens !
Aujourd’hui, c’était l’anniversaire de ma sœur Holly, mon ainée de quatre ans. Si j’avais toujours été plus proche de Noélia, la plus vieille de nous trois, je vivais aujourd’hui avec Holly comme seule sœur à la maison et de ce fait, nous passions désormais pas mal de temps ensemble. Il était certain qu’avec Nono, nous avions un rapport réellement fusionnel, je pouvais tout lui dire, je lui vouais une confiance absolue, et je savais que quel que soit ce que je lui demandais, elle répondrait présente. Ça avait toujours été comme ça depuis toute petite, elle m’avait protégé dès ma naissance, prenant le rôle d’une deuxième mère pour moi. Avec Holly, ça avait été différent. Nous étions aussi proches que deux sœurs puissent l’être mais elle était plus à l’écart, préférant passer la soirée le nez dans ses bouquins qu’avec nous avachies dans le canapé devant une comédie romantique. Souvent, on venait frapper à la porte de sa chambre, espérant secrètement qu’elle nous rejoindrait et viendrait s’emmitoufler sous le plaid avec nous, se goinfrant de popcorn les larmes aux yeux devant ce film à l’eau de rose qu’on aimait tant. A chaque fois, elle déclinait l’invitation et je redescendais en bas, ma déception sous le bras. « Encore raté… » Disais-je à Noélia en prenant une poignée de mais soufflés et en m’installant à ses côtés. Seulement depuis notre arrivée à Winnipeg, Noélia avait pris son indépendance, elle passait son temps au cabinet dans ses dossiers, on se voyait beaucoup moins. A la maison, Holly était toujours très studieuse, révisant et buchant sur ses cours des heures durant. Du coup, je vaquais à mes occupations, qui n’étaient pas franchement nombreuses. Je n’avais pas énormément d’amis ici, et depuis la fuite d’Eli, j’étais un vrai déchet. Je voyais bien que ma sœur ne voyait pas ma dépression d’un bon œil mais je n’avais aucune envie de parler de ce qui m’arrivait, encore moins à Holly qui avait toujours été un peu trop proche des parents. J’avais peur de ce qui pourrait arriver si je lui avouais ce qui se passait dans ma vie. 
